Le débarquement
- Quentin Cucuel
- 11 janv. 2015
- 3 min de lecture
Alors voilà, ce chapitre commence par la fin de mon contrat au sein de mon ancienne équipe d'Ubisoft, à Paris, fin août 2014. Sans rentrer dans les détails, j'avais envie de mettre les mains dans le processus de création d'un jeu vidéo et mon contrat se terminant, c'est la bonne occaz' de chercher un poste dans un des 25 studios de production du groupe. Parmi les différentes pistes qui m'étaient proposées, le studio de Chengdu avait en tête quelque chose qui collait parfaitement avec mes aspirations et certaines de mes compétences.
C'est comme ça que je me suis retrouvé 4 mois et demi plus tard, dans mon salon-cuisine-chambre d'ami (au singulier) parisien, à me demander ce que j'allais faire de mes plantes vertes.

Mon regretté monopièce parisien
Alors que je trainais mes 40kg de bagages autorisés vers l'aéroport CDG, l'ambiance en France était morose. Deux connards avaient déversé leurs pulsions barbares dans les locaux de Charlie Hedbo et étaient en fuite dans la région parisienne, occasionnant de nombreux kilomètres de bouchons. J'étais à la bourre et pas vraiment l'esprit concentré sur l'aventure. C'est donc en toute logique que je me suis vu refuser l'accès à l'embarquement. Les forces co(s)miques avaient décidé que non, je ne pouvais pas partir la tête dans le potage, et ont ordonné à China Airlines d'émettre les billets au nom de Mr QJFJ Cucuel. Voila voila.

Grosse poilade avec les hôtesses
Le jour suivant, requinqué par un dîner bonus en compagnie de ma petite famille, je ré-empruntai la route de l'aéroport, conscient que les deux bozzos sus-mentionnés avaient décidé d'opérer leur prise d'otage à côté de ce dernier. Le truc qui sent pas le moisi.
Mais non, tout s'est en fait très bien passé: les hôtesses (ci-dessus) au comptoir m'ont reconnu, fait griller la queue, réservé une rangée pour mon petit confort et m'ont souhaité bon voyage. J'étais excité comme un acarien au salon de la moquette. Rien de pouvait plus m'arrêter.
14 heures de vol + 4 heures d'escale plus tard, je franchissais la porte de sortie de l'aéroport de Chengdu, où un chauffeur envoyé par Ubisoft m'attendait. Il ne parlait pas un mot d'anglais, je ne parlais pas un mot de chinois, je sentais l'animal mort, et nous allions passer l'heure qui suivait dans sa voiture.

Arrivée en grandes pompes à Chengdu
Face à la perspective du silence pesant, nous avons tenté de communiquer: lui avec un Mandarin normalement destiné à un enfant de moins de 18 mois, et moi avec un anglais monosyllabique. L'échec était évident, nous en sommes alors venus aux mains. Aux mimes en fait.
Je ne le réalisais pas encore, mais c'est encore ainsi qu'allaient se passer la plupart de mes échanges conversationnels. Mais ne vous impatientez pas déjà! Ce sera l'objet d'un autre chapitre.
Mr Zhou me conduisit jusqu'à l'immeuble dans lequel j'allais temporairement prendre mes quartiers, et au pied duquel une personne m'attendait déjà. En partie soulagé de la gêne de nos échanges avec le chauffeur, je déchantais immédiatement en constatant que mon interlocuteur non plus ne parlait pas un mot d'anglais. Moins les mimes. On est monté au 29ème étage, il m'a expliqué un tas de trucs, j'ai poliment opiné du chef, il m'a tendu les clefs et il est parti.
4 mois d'attente, 3 semaines d'effervescence administrative, 5 jours de déménagement, 18 heures de voyage retombés au claquement de porte. Je me trouvais exactement à l'instant entre la clôture d'une partie de ma vie et la pente vertigineuse d'une montagne de choses à faire. Au milieu d'un appartement pas très beau, perché en haut d'un immeuble dans une zone excentrée d'une ville qui m'était absolument inconnue. Comme un con.
Et pourtant impatient.
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